Damien Rieu cause prison et immigration. Ça lui prend de temps en temps, quand il ne sait pas quoi twitter. Allez hop, un petit coup de prison, c’est une cible facile. Rien de nouveau sous le soleil nous direz-vous, c’est un vieux thème de l’extrême droite visant à légitimer une politique qui exclut les immigrés.
Mais on va quand même y regarder de plus près. Parce que ce qui est intéressant ici, c’est la façon dont on va construire un contre-discours.
Damien Rieu et les chiffres sur la prison
Nous ne sommes pas dupes, Damien Rieu a twitté sur un coin de table, il parle de prison comme il parlerait d’autre chose. C’est une affirmation en l’air, qui ne trompe personne en commentaires. D’ailleurs aucune actualité brûlante ne traite de ce sujet (à part l’OIP qui fait un super travail et qui soulève de vrais problèmes de discrimination en milieu carcéral).Malgré tout, on va quand même revenir sur le contenu. Et pour commencer, on va rappeler ce qui pour nous sonne comme une évidence : l’extrême droite a vraiment du mal avec les statistiques, on en parlait il y a 10 ans déjà.Le contenu du tweet
Reprenons dans l’ordre.95% des détenus sont des hommes.
En 2022, on compte plus de 70 000 détenus sous écrou, dont 96,4% d’hommes. On ne va pas chipoter, l’ordre de grandeur est correct. Il s’agit d’un chiffre en augmentation, au risque d’alimenter la surpopulation carcérale.
Des hommes discriminés ?
“Pourtant il ne viendrait à l’idée de personne d’expliquer que c’est parce que les H sont discriminés qu’ils sont en prison. ”
Si les hommes sont en prison, c’est parce qu’ils ont été reconnus coupables par un tribunal d’un crime ou délit nécessitant aux yeux de la loi d’une incarcération. On peut discuter des raisons, elles sont multiples, mais ce n’est pas parce qu’ils sont des hommes.
Un cas flagrant de whataboutism !
“Alors pourquoi faire croire que la surreprésentation de certaines origines serait liée à des discriminations ?”
Déjà, regardons une définition de la discrimination :
La discrimination sociale est un processus lié au fait d’opérer une distinction concernant une personne ou une catégorie sociale en créant des frontières dites « discriminantes », c’est-à-dire produisant un rejet visant à l’exclusion sociale sur des critères tels que l’origine sociale ou ethnique, la religion, le genre, le niveau de son intelligence, l’état de santé, etc. Wikipedia
S’il y a bien un groupe social qui n’est pas discriminé, ce sont les hommes. Mais ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas des hommes discriminés. Ils ne le sont pas pour leur genre, mais pour d’autres raisons, en général leur appartenance à des minorités.
Ici, Damien Rieu sous-entend en tournant autour du pot que si les immigrés sont plus nombreux en prison, ce n’est pas de la discrimination, c’est une évidence : l’immigration est le problème. Or, il n’y a pas de statistiques ethniques en France, pas plus sur les détenus qu’ailleurs. Tout juste on a un chiffre du nombre d’étrangers détenus dans des prisons françaises. Mais à Reconquête on a une lubie, c’est l’Islam et chez Zemmour on a plus recours à l’institut du doigt mouillé que l’Insee avec des chiffres farfelus.

Donc à partir d’une statistique qui n’existe pas, il utilise une statistique bien réelle mais en fait un mauvais usage, c’est ce qu’on appelle du whataboutism. En clair, il s’agit de détourner l’attention sur une critique avec une comparaison foireuse. Et foireuse, celle ci l’est assurément.
L’origine sociale des détenus
Ce qui passe à la trappe dans la démonstration de Damien Rieu, c’est le « qui » est en prison. En l’occurrence, on trouve en majorité des personnes en situation de grande précarité. C’était le cas en 2003, et ça l’est encore.Nous devons tout de même rappeler que l’État a été mis en cause pour des discriminations dans les contrôles de police justement en raison de l’origine ethnique des principaux concernés. Les détenu-e-s transgenres sont également sujets à des discriminations.
Être méchant avec les méchants
Pour Damien Rieu, tous ceux qui se trouvent en prison rentrent dans la case « méchant ». Reconnaissez, cette posture est facile à tenir sur Twitter, mais à l’épreuve du pouvoir, il y a fort à craindre que ça n’aille pas très loin.
De l’importance de fabriquer un contre discours
Mais pourquoi Damien Rieu nous raconte ça ? En aucun cas, il ne se rêve garde des sceaux. Ici, il ne s’agit que de servir un narratif : celui d’une immigration dangereuse. C’est ce récit qu’il faut refuser. Ce n’est pas l’immigration le problème, c’est la précarité et la misère.Voilà la base de notre contre-discours.